Actualités 04.04.2024

Scandales des eaux filtrées Nestlé : nouvelles révélations sur le risque sanitaire des eaux, foodwatch demande le rappel des bouteilles

C’est un nouveau rebondissement qui a lieu dans l’affaire des fraudes massives aux eaux minérales contaminées ce jeudi 4 avril. Les journalistes du Monde et de Radio France à l’origine des premières révélations sur le recours à des systèmes de traitement de l’eau illégaux par de grands industriels publient aujourd’hui de nouvelles informations choquantes. Une note de l’Agence nationale de santé, l’Anses, remise au gouvernement en octobre 2023, informe d’un risque sanitaire sur les eaux mises en bouteille en France par Nestlé. Des contaminations ont été détectées sur ces eaux filtrées illégalement, puis mises en bouteilles et commercialisées comme si de rien n’était. Pour foodwatch, au vu du risque sanitaire souligné par l’Anses, il faut rappeler les bouteilles et informer enfin tous les pays importateurs en Europe. 

En février, des journalistes du Monde et de la cellule d’investigation de Radio France révélaient que les eaux minérales de Nestlé Waters et de Sources Alma n’étant plus pures, ces géants de l’eau en bouteille auraient eu recours à des systèmes de traitement de l’eau illicites pour les mettre sur le marché.

Ce jeudi 4 avril, les journalistes Marin Dupin et Stéphane Foucart révèlent de nouvelles informations choquantes après s’être procuré une note de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), transmise au gouvernement en octobre 2023. Cette expertise a été réalisée par le Laboratoire d’hydrologie de Nancy (LHN), le département de l’Anses chargé de la sûreté des eaux de consommation.  L’Anses a conclu à un « niveau de confiance insuffisant » pour « garantir la qualité sanitaire des produits finis ». Autrement dit, des contaminations – fécales ou bactérie Escherichia coli « dans des concentrations parfois élevées », pesticides, PFAS (ces polluants éternels nocifs pour notre santé), ou encore micropolluants – ont été détectées sur ces eaux, qui ont pourtant été mises en bouteille et commercialisées. A partir de ce rapport, les journalistes du Monde et de Radio France ont ainsi relevé la « contamination généralisée des sources exploitées par Nestlé » sur les sites qui produisent les marques Hépar, Perrier et Vittel. 
 

« Au vu des informations alarmantes sur le risque sanitaire mentionnées dans l’expertise de l’Anses depuis des mois, les bouteilles d’eaux de Nestlé doivent être rappelées et les autres Etats membres de l’Union européenne informés de toute urgence. La directive européenne sur les eaux et le code de la santé publique sont limpides : lorsque l’eau minérale est polluée, il ne fait aucun doute que la mise en bouteille et la commercialisation doivent être suspendues. »
Ingrid Kragl Directrice de l'information foodwatch France

L’Anses aurait recommandé la mise en place d’un plan de surveillance renforcé et alerté sur le risque sanitaire virologique important. Si ces recommandations ont bien été transmises aux autorités de santé françaises, foodwatch interroge : qu’a-t-il été mis en place pour y donner suite ? Ces alertes de l’Anses ont-elles été ignorées par le gouvernement depuis octobre dernier ? A quel risque pour la santé ont été exposés les consommateurs et consommatrices et depuis quand ? Pourquoi Nestlé Waters a-t-elle pu continuer à commercialiser ses eaux frauduleuses ? Pourquoi le gouvernement français n’a-t-il rien communiqué aux consommateurs et consommatrices et s’est même abstenu d’en parler à la Commission européenne ?

Pour foodwatch, qui a porté plainte dans cette affaire de fraude massive pour neuf infractions, l’opacité non seulement de Nestlé Waters et Sources Alma, mais aussi des autorités françaises dans cette affaire pose de multiples et graves questions.  
 

Eaux illégalement filtrées : foodwatch interpelle l’Europe et obtient gain de cause

Face au silence radio de la France dans cette affaire, foodwatch a saisi en février dernier la Commission européenne : notre association a adressé un courrier à Stella Kyriakides, Commissaire européenne à la Santé , pour lui demander d’agir et de diligenter un audit de la France. Dans notre viseur : l’obligation imputée au gouvernement français d’avertir les autres Etats membres de l’Union européenne, en vertu de la directive européenne sur les eaux, de toute contamination probable des eaux à la consommation importée hors de ses frontières. 

Or, à ce jour, aucune information n’est parue sur le réseau d’alerte européen, RASFF – qui permet d’informer les autres pays de l’UE -, faute d’informations sur les risques sanitaires communiqués par la France. Les révélations des journalistes aujourd’hui pourraient peut-être changer la donne.
 

Notre courrier à la Commission européenne a eu un véritable impact. Non seulement, le 30 avril prochain, la France devra s’expliquer devant les autres Etats membres lors d’un comité technique européen appelé Scopaff, mis en place pour assister la Commission dans l'élaboration des mesures qui concernent les denrées alimentaires, mais la Commission européenne a aussi réagi favorablement à la demande d’audit de foodwatch puisqu’elle va « vérifier sur place les résultats de l'action des autorités françaises compétentes en matière de contrôle de la conformité aux règles de l'UE relatives aux eaux minérales naturelles ». Le rapport de cet audit européen sera ensuite rendu public, les engagements de la France sur son plan d’action y seront détaillés noir sur blanc.  

De scandale en scandale, l'histoire se répète : opacité pour les consommateurs et consommatrices trompé·es sur la qualité substantielle du produit, manque de traçabilité et de contrôles, absence de sanctions, sous-effectifs criants au sein des organismes de contrôle publics. Transparence des informations et renforcement de la réglementation sont nécessaires pour briser l'omerta et l'impunité qui règnent dans le secteur de l'agroalimentaire.
 

Aidez-nous à plonger dans les eaux sombres des scandales alimentaires et à éclabousser les industriels de leurs responsabilités

Le scandale des eaux minérales filtrées illégalement nous rappelle celui de la viande de cheval dans les lasagnes, il y a une dizaine d’années. En tant que contre-pouvoir citoyen, il est de notre devoir d’agir pour que ces pratiques soient sanctionnées, c’est pourquoi nous portons plainte. Pas question de les laisser sans rien faire : c’est une fraude massive pour laquelle Nestlé Waters et le groupe Sources Alma, ainsi que l’État français, devront rendre des comptes. 

Nous soutenir financièrement, c'est nous aider à continuer !

Creuser, recouper, dévoiler, compiler, vérifier, alerter, accompagner les victimes… ce combat que nous menons contre les scandales alimentaires va être long. Nous verser un don chaque mois, c’est participer activement à nos actions. Association 100% indépendante, notre travail méticuleux n’est possible que grâce à votre soutien financier

Je fais un don